Un vaste pan de l’histoire de l’art occidental du XXe siècle est façonné par l’activité d’artistes ayant en commun l’expérience de l’exil, voulu ou subi, temporaire ou définitif, entre douleur et ouverture sur d’autres mondes.
Parmi eux, Mao To Laï est l’un des rares peintres venus du Vietnam. Probablement enfant de soldat français, il est séparé de sa famille et envoyé en France peu après 1954, année qui marque la fin de la Guerre d’Indochine.
Parti de rien, mais animé au départ du désir farouche de s’adapter à la vie et aux pratiques picturales de la scène parisienne, il renoncera finalement à l’huile sur toile pour se consacrer exclusivement à l’encre sur papier. L’exposition offre un aperçu de cet œuvre sur papier.
MAO exprime d’abord, au tournant des années 1970, son trouble devant les comportements humains et la « violence amère du réel »* fleuretant parfois avec l’humour noir de Roland Topor (un ami, semble-t-il) ou de Tomi Ungerer (The Party, 1966).
Passant ensuite au pinceau et au lavis, il renoue progressivement avec des sources - technique et images - reléguées dans son subconscient. Les signes de la réminiscence se font dès lors plus présents.
Souffrant de surdité complète, Mao To Laï a puisé dans la peinture des moyens d’affirmation, mais aussi d’évasion.
De ses œuvres surgissent deux sentiments contradictoires et étrangement entremêlés : l’intranquillité sans fin, et le désir de s’en remettre à la contemplation des choses simples.
Plutôt que d’exprimer un mode de pensée, « Mémoire d’image » - ensemble réalisé sur plus d’une décennie - instaure un rapport élémentaire à la vie, dans lequel sont mis au même niveau et articulés les dimensions personnelles et collectives, l’intime et le politique.
* Formule de Roland Topor.